Thierry Sebagh : « L’ISG, une école où l’on apprend l’agilité »

Nouveaux parcours, enseignements technologiques et digitaux, espaces repensés, synergie avec d’autres établissements…, l’ISG a entamé une petite révolution. Face aux bouleversements des fonctions managériales et de la façon d’entreprendre, cette Grande École créée en 1967 a repensé son modèle pédagogique. Une réponse aux nouvelles attentes de ses étudiants, futurs managers, pour leur donner les clés pour innover dans un monde totalement ouvert.
Entretien avec Thierry Sebagh, directeur général de l’ISG.


Le modèle traditionnel des business schools semble aujourd’hui obsolète et dépassé. Pourquoi ?
Ce modèle a changé car les métiers auxquels nous préparons les étudiants ont changé. Aujourd’hui, ces derniers ont conscience que les fonctions qu’ils vont occuper nécessitent des doubles compétences. Notre rôle est de les former à cela : aujourd’hui, on peut difficilement penser le marketing sans qu’il soit digital, la communication sans les réseaux sociaux, le commerce sans le mobile… Tout cela nécessite de la technologie, du digital et des compétences qui impliquent une plus grande porosité entre les étudiants et leurs écoles. Cela se voit au niveau des écoles d’ingénieurs qui mettent en place de plus en plus des filières marketing. Si nos étudiants ne sont pas capables de créer des moteurs, ils peuvent, à l’inverse, mener des politiques marketing digital, animer des réseaux sociaux et déployer des solutions digitales, mobiles et multisupports.

« Nous souhaitons faire de l’ISG la plus tech des business schools. »

Comment ce nouveau paradigme se traduit-il à l’ISG ?
Cette mutation se traduit de deux manières. La première, c’est la très forte augmentation des enseignements technologiques : près de 30 % des cours du premier cycle concernent désormais le digital ou la technologie. On parle ainsi de la transformation digitale, des nouvelles technologies, de l’expérience utilisateur, de l’animation de communauté… Tout cela sous le prisme des métiers du business et du management de demain. La seconde touche au modèle de l’école : nous souhaitons faire de l’ISG la plus tech des business schools. Et pour cela, nous faisons régulièrement venir à l’école des entreprises qui ont des problématiques concrètes – des questionnements mobiles, digitaux et sociétaux – sur lesquelles les étudiants planchent. Le groupe Pernod-Ricard est, par exemple, venu les mettre au défi sur comment faire adopter aux jeunes générations une consommation d’alcool maîtrisée. Nous avons aussi travaillé avec LVMH sur la cosmétique responsable ou encore avec Mercedes sur la place du gaming dans l’automobile de demain. Ces business cases constituent un apprentissage par les pairs. Leur répétition apporte une expertise et permet aux étudiants d’acquérir des réflexes. Quand les étudiants sortent diplômés, ce sont des véritables professionnels à part entière qui possèdent déjà les automatismes du métier. La répétition de ces cas, sur des fonctions et des secteurs, est primordiale.

Cette pédagogie par projets est donc amenée à occuper une place plus importante dans l’apprentissage ?
Oui, aujourd’hui, les projets représentent de 15 à 20 % de notre pédagogie. Nous souhaiterions que ce chiffre monte très rapidement à 50 % pour que nous arrivions à deux jours par semaine totalement dédiés à cette approche. Au fur et à mesure du cursus, le nombre de ces cas et leur complexité augmente, afin qu’ils débouchent en dernière année sur des propositions d’emplois.

Comment se met concrètement en place ce pont entre business et technologie ?
En 3e et 4e année du programme Grande École, nous permettons à nos étudiants d’acquérir des nano-certificats « tech & digital », pouvant déboucher sur des certifications :  IA & chatbots, Big Data & Data Science, cybersécurité, plateformes collaboratives, webdesign et créativité, blockchain ainsi que transports du futur. Ils sont dispensés en partenariat avec deux écoles d’ingénieurs du Groupe IONIS, l’ESME Sudria et l’EPITA, ainsi qu’e-artsup, école de création numérique, mais aussi des entités prestigieuses comme IBM ou le ministère de la Défense. Ce dispositif est amené à s’étendre à d’autres cursus. Ces certificats constituent des atouts pour les étudiants qui peuvent se prévaloir d’une expertise certifiée. En parallèle, nous avons créé un parcours « Manager-ingénieur de la tech » qui permet à nos étudiants de se former aux nouvelles technologies avec l’EPITA.

Le programme Grande École a lui aussi été repensé. Comment ?
Nous sommes passés d’un modèle en 3 ans post-prépa à un modèle en 5 ans, directement accessible après le bac et intégré à Parcoursup. Cela a changé beaucoup de choses, notamment la philosophie des deux premières années. Nous voulions qu’elles soient très orientées sur les Humanités – cela correspond à l’évolution du bac – pour apporter cette connaissance si importante à ce moment de la formation, pour s’ouvrir aux cultures et au business des pays dans lesquels on va travailler. Ces deux premières années sont thématisées par continent. Puis l’enseignement est fortement articulé entre le management et la technologie. Nous avons d’abord besoin d’étudiants qui soient familiers de ces technologies pour qu’elles deviennent des outils de business. Au cours de sa vie professionnelle, un diplômé sur deux de l’ISG passe par l’entrepreneuriat. Et, s’il y a quelques années, ils entreprenaient dans des secteurs très balisés, aujourd’hui l’entrepreneuriat devient indissociable de l’innovation dans des secteurs très différents ; ils ont besoin d’acquérir « le flair » du business et de s’intéresser à des champs aussi vastes que possible.

« L’ISG a toujours inscrit l’entrepreneuriat dans son ADN, ainsi que l’international. L’école a renforcé ces dimensions en y ajoutant une dose très forte d’innovation. »

En plus de 50 années d’existence, l’école a beaucoup évolué. Qu’est-ce qui fait toujours son ADN ?
L’ISG a toujours inscrit l’entrepreneuriat dans son ADN, ainsi que l’international. L’école a renforcé ces dimensions en y ajoutant une dose très forte d’innovation. Beaucoup venaient avant tout à l’ISG pour y apprendre les métiers de la gestion. Aujourd’hui, pour diriger des entreprises, on doit être visionnaire et innovateur. Pour cela, il faut apprendre à se servir de la tech et avoir cette vision business. Il faut aussi être ouvert sur le monde pour pouvoir s’inspirer, développer des idées, sentir des tendances et imaginer des nouveaux marchés en sachant capter les signaux faibles.

La proximité avec ses Alumni fait aussi partie des piliers de l’ISG
C’est une dimension que nous avons considérablement renforcée. Les Alumni sont présents à tous les niveaux : au moment du recrutement des élèves, lors des business games et des challenges, dans le mentorat… Ils participent activement à tous les événements importants de l’école. Cette communauté est extrêmement active.

Ce qui fait la force des diplômés et des étudiants, c’est leur agilité et leur capacité de réaction. D’où leur vient ce talent ?
Il existe deux types d’écoles de commerce : celles où vous apprenez à gérer des budgets et des équipes, où l’on formate les étudiants à intégrer de grandes entreprises. Et à côté, celles comme l’ISG, où vous apprenez à gérer la pénurie de ressources et de moyens. Cela produit des esprits qui ne fonctionnent pas de la même manière : cela vous façonne à être sans cesse plus ingénieux et plus flexible. Nos étudiants apprennent à se débrouiller. C’est en ce sens que l’ISG est une école où l’on apprend l’agilité, à faire et à lancer ! C’est pourquoi nous avons autant d’Anciens qui passent par l’entrepreneuriat, parfois même après avoir occupé de très hautes fonctions. Ce sont des hommes et des femmes qui imaginent des solutions, pas de simples gestionnaires. Ils savent que leur cerveau et leur imagination sont beaucoup plus précieux que les ressources que l’on va leur confier. Car la contrainte libère l’imagination.

Le Studio 45 est situé sur le campus Paris Ouest de l’école, en plein cœur du 16e arrondissement. Ce nouvel espace de 1 500 m² est dédié à la collaboration entre étudiants, l’innovation pédagogique, l’incubation entrepreneuriale et la vie associative. Au service de la production d’idées et de solutions répondant aux problématiques concrètes des entreprises, le Studio 45 accueillera plus de 60 projets étudiants à la prochaine rentrée et plus d’une centaine dès la rentrée suivante.

Parmi vos nouveaux projets, il y a l’ouverture du Studio 45. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce nouvel espace du campus parisien ?
Nous avons besoin de lieux pour amener nos étudiants à travailler en mode projets. En équipes, ils doivent répondre à des défis lancés par des entreprises partenaires. Il nous fallait des espaces dans lesquels nos élèves pourraient pousser le développement de ces projets, notamment ceux développés lors de ces challenges. Or les amphis et les salles de cours ne s’y prêtent pas. Nous avons donc totalement repensé notre campus du 45 rue Spontini, où désormais la base du module de travail est de quatre personnes. Nous avons cassé les salles de classe pour en faire un espace modulaire. Pendant 20 semaines tout au long de l’année scolaire, des entreprises y viendront pour présenter leurs projets et faire travailler nos étudiants, peu importent les programmes. Le Studio 45 sert aussi d’incubateur : il accueillera plus de 60 projets étudiants à la prochaine rentrée et plus d’une centaine dès la rentrée suivante.

Comment voyez-vous l’école dans les années à venir ?
Elle sera d’abord transformée par sa pédagogie : les cours magistraux, les amphis et les salles de classe n’existeront plus sous la forme que l’on connaît. L’école sera constituée de professeurs et d’intervenants qui travailleront sur des sujets sociétaux et digitaux. Nous allons poursuivre notre développement « à la manière » des écoles d’ingénieurs, autour du renforcement de l’apprentissage par les pairs et la généralisation des projets. Notre objectif est que 20 % d’une promotion se lance directement dans l’entrepreneuriat après le diplôme, ou pendant les études. Jusque-là, beaucoup d’Anciens abandonnaient leur projet d’entreprise car ils passaient d’abord par la case salariat. Or, en les mettant en situation pendant les études, cela va changer et leur faire comprendre qu’ils peuvent se lancer dans la création d’entreprise très tôt !

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