Réunissant des étudiants de l’EPITA, de l’IPSA et d’Epitech, l’association parisienne Evolutek est spécialisée dans la création de robots depuis plus de 20 ans. Cette spécificité lui permet de participer régulièrement à la Coupe de France de Robotique, une compétition annuelle voyant des équipes venues de toute l’Hexagone s’affronter autour d’une épreuve originale. Et cette année, à l’occasion de l’édition 2020 de l’événement qui se déroulait les 28 et 29 octobre à La Roche-sur-Yon (Vendée), l’équipe d’Evolutek est parvenue à se frayer un chemin jusqu’à la 5e place au classement général, soit sa meilleure performance depuis près de 10 ans ! L’association a également été récompensée par le Prix de l’esprit d’équipe !
Revivez le parcours d’Evolutek lors de la Coupe de France 2020 en vidéo : 1re série, 2e série, 3e série, 1/8 de finale, 1/4 de finale et remise du Prix de l’esprit d’équipe !
Corentin Vigourt (EPITA promo 2020) ne cache pas son plaisir. Président d’Evolutek et membre de l’association depuis sa 1re année à l’EPITA, ce jeune diplômé ne pouvait pas rêver meilleur moment pour passer le flambeau à une nouvelle équipe dirigeante au sein de la structure. Lui, le passionné de robotique, passé par la Majeure GISTRE et l’équipe de recherche SEAL de l’école, spécialisée en robotique d’exploration & systèmes embarqués, termine donc en beauté son mandat. L’occasion était donc trop belle pour ne pas revenir avec lui sur cette performance, sa passion et le futur de cette association emblématique !
Tout d’abord, combien de membres compte Evolutek ?
Corentin Vigourt : C’était un peu particulier cette année car, avant le premier confinement, nous avions une équipe assez conséquente, et après, certains sont partis et de nouveaux sont arrivés. En général, nous sommes une douzaine à travailler sur les robots. Cette année, en raison de ces mouvements, nous avons plutôt été une vingtaine d’étudiants à travailler sur le projet, avec des participations plus ou moins régulières selon les emplois du temps de chacun.
La particularité d’Evolutek, c’est de réunir des étudiants de d’écoles et de niveaux différents, non ?
C’est vrai. Avoir des étudiants de trois écoles différentes est l’un des atouts de l’association. D’un côté, il y a les IPSAliens, qui ont plus un profil de mécaniciens – même si Evolutek les pousse toujours à se diversifier – et de l’autre, les étudiants de l’EPITA et d’Epitech, qui sont plutôt des informaticiens – même si certains font aussi de l’électronique à côté. Quant au niveau des étudiants, il est aussi très varié car l’association est ouverte à tous, de la 1re à la 5e année, peu importe l’école concernée ni les compétences : nous recrutons uniquement les personnes intéressées et les formons nous-mêmes. Nous avons mêmes des Anciens qui continuent de participer !
Cette diversité est idéale pour faire de la robotique ?
Oui car c’est un sujet très large qui ne se concentre pas que sur un seul domaine. Il y a bien sûr de la mécanique pour la conception des robots, mais aussi de l’électronique pour les faire fonctionner et de l’informatique pour la partie contrôle. Chez Evolutek, on construit nos robots de A à Z : on part de rien, on récupère des pièces, on ajoute de l’électronique, on teste du code… Et à la fin, on en arrive à un robot abouti que l’on peut utiliser sur une table de test, en vue de participer à la Coupe de France de robotique.
Cette année, la Coupe de France a-t-elle été chamboulée par la Covid-19 ?
D’habitude, la compétition se déroule à la fin du mois de mai et la thématique de l’édition ainsi que le règlement/cahier des charges sont généralement révélés par Planète Sciences au mois de septembre de l’année précédente. Cette année, en raison du contexte, l’événement a été décalé à la fin du mois d’octobre. Ce délai nous laissait plus de temps pour réfléchir, mais en même temps, comme nous ne pouvions pas forcément accéder à notre local à cause du confinement et des conditions sanitaires, ce n’était pas un si grand avantage que cela. En effet, la majeure partie du travail tourne autour de la réalisation du robot et des phases de tests à réaliser sur une table spécifique de 3 m sur 2 m correspondant à celle de la compétition. Bon, nous avions tout de même réussi à prendre nos dispositions pour avancer à distance. J’avais même récupéré un de nos deux robots pour finir le montage et mener les tests de déplacement du robot à mon domicile, tandis que les autres parvenaient à continuer à travailler sur le code ou l’électronique.
Quelle était la thématique de cette année ?
C’était « Sail The World ! », un thème très centré sur la navigation et l’exploration. Les robots devaient alors récupérer des bouées échouées – représentées par des gobelets réutilisables – afin d’ensuite les disposer pour créer des chenaux de navigation pour les navires.
Quelles compétences du robot doit-on développer pour participer à la Coupe de France ?
Elles sont nombreuses. En premier lieu, la base du robot, c’est la partie motrice : il faut que le robot puisse se déplacer, notamment pour une compétition comme celle-ci qui nécessite de réaliser beaucoup d’aller-retours, mais aussi se localiser, pour savoir où il se situe sur la table. C’est très important. La deuxième partie à développer concerne les actionneurs. Ce sont eux qui vont permettre au robot de récupérer, trier et déposer les éléments de jeu – c’est généralement une partie dont s’occupent les étudiants plus axés mécanique. Ensuite, il y a une troisième partie, dédiée cette fois à l’Intelligence Artificielle. Sans elle, impossible pour le robot de savoir où aller ni quand actionner les actionneurs. Enfin, la dernière partie porte sur la reconnaissance, pour permettre au robot de déterminer la couleur des éléments de jeu ainsi que leurs dispositions.
Quelle a été la partie la plus complexe à aborder cette année ?
On serait tenté de dire qu’il s’agissait de la partie liée aux actionneurs. Parvenir à manipuler des gobelets en plastique n’est pas si simple que ça. La partie IA a été aussi délicate, pour permettre au robot d’être capable de prendre les bonnes décisions, mais comme nous avons une grosse composante informatique à l’EPITA, ce ne fut pas non plus insurmontable. Au final, c’est plutôt le fait d’arriver à faire fonctionner l’ensemble qui est le plus difficile.
Donnez-vous un nom à vos robots ?
En fait, pour chaque édition, nous préparons généralement deux robots. La particularité de cette édition est que nous avons réalisé cette fois deux robots « jumeaux », c’est-à-dire identiques, pour des raisons de gain de temps et d’efficacité, mais aussi afin de pouvoir faire un match entier avec un seul robot si l’un tombe en panne. Par contre, nous gardons toujours les mêmes noms pour nos robots depuis plus de dix ans ! Cela vient d’un temps où le règlement demandait à avoir un robot principal (PAL) et des robots secondaires (PMI – pour « petits modules indépendants »). Ainsi, depuis cette période, nous continuons à appeler nos robots PAL et PMI, pour le côté un peu symbolique et maintenir la tradition.
Cette année, les robots de l’équipe d’Evolutek ont justement brillé lors de la Coupe de France !
Oui ! Nous avons d’abord atteint la 4e place à l’issue des qualifications, une étape où les équipes essaient de marquer le plus de points afin d’établir un classement avant les phases finales. Puis, lors de ces phases justement, nous avons réussi les huitièmes, mais pas les quarts. D’où cette 5e place au classement final, une performance qu’Evolutek n’avait pas accomplie depuis 2010.
Vous étiez assez confiants avant la compétition ?
Plutôt oui, ne serait-ce que pour le format un peu spécial de cette année qui voyait concourir près de 45 équipes contre les 130 habituelles. On s’attendait donc à faire un score assez élevé et l’on visait clairement le top 16. Surtout, on a finalement eu l’occasion de réaliser plus de tests que certaines équipes, ce qui nous permettait d’arriver dans la compétition avec un robot bien « ficelé ». Toutefois, on reste malgré tout un peu déçus de n’avoir pas pu dépasser le stade des quarts de finale : nous avons connu des soucis techniques et sommes tombés contre une équipe qui, elle, avait encore plus d’essais que nous au compteur. C’est là où s’est faite la différence. Mais on espère au minimum pouvoir à nouveau faire top 16 et un quart de finale pour la prochaine édition !
Parlons de l’an prochain. Quand aura lieu cette édition 2021 ? Connaissez-vous déjà le thème ?
Pour l’instant, l’édition 2021 reste prévue pour la fin mai, toujours au Parc des Expositions de La Roche-sur-Yon, une ville qui est un partenaire historique de l’association Planète Sciences pour l’organisation de la compétition. Après l’annonce du confinement et du changement de dates pour l’édition 2020, un sondage a été fait auprès des équipes pour savoir ce qu’elles préféraient pour l’édition 2021. Au final, il a été décidé que le thème comme le règlement seraient les mêmes que ceux de cette année. Cela permettra aux équipes n’ayant pas pu participer cette année de finaliser leur robot pour concourir. Pour celles ayant pu déjà participer, l’organisation de la Coupe de France a aussi pensé à des défis à réaliser. Enfin, le règlement a été amélioré en prenant en compte de ce qu’il s’est passé durant la compétition. D’ailleurs, je fais partie de la commission qui s’occupe du règlement qui concerna l’édition 2022, règlement sur lequel nous travaillons actuellement.
De ce fait, avec ce maintien du thème, vous avez finalement la possibilité d’uniquement customiser vos robots, non ?
Pour la petite histoire, nous avons déjà l’habitude de customiser nos robots car, en plus de la Coupe de France, nous participons aussi souvent à d’autres compétitions, comme la Coupe de Belgique ou Coupe de Suisse. Ces compétitions sont en fait les finales étrangères permettant de sélectionner les représentants de chaque pays pour Eurobot, la finale européenne. Elles suivent donc le même règlement que la finale française et se déroulent généralement avant la Coupe de France. Cela nous laisse alors le temps d’améliorer notre robot. Pour l’édition 2021, même si ça nous laisse plus de temps en théorie, nous avons tout de même fait un certain nombre de choix, comme le fait de modifier une partie de la mécanique du robot afin de réaliser de meilleurs scores ou changer notre technologie servant à détecter l’adversaire pour aller encore plus vite sur la table. Le but d’Evolutek est aussi de permettre à ses membres d’apprendre et de prendre part à des projets : on ne voulait pas attendre sans rien faire. Enfin, l’association va aussi évoluer. Une nouvelle équipe, avoir moins d’expérience, va prendre le relais à la tête d’Evolutek. Elle aura notamment en charge de changer toute l’électronique du robot, qui se fait plutôt vieille – la partie de contrôle des moteurs date de 2010 et commence à nous poser des soucis quand il s’agit d’apporter des modifications. Cela promet de beaux défis !