Cet été, les quatre écoles d’ingénieurs du Groupe IONIS (l’EPITA, l’ESME, l’IPSA et Sup’Biotech) ont abandonné leur statut d’associations pour devenir des sociétés à mission. Une mutation structurelle qui formalise une dynamique responsable et sociétale, déjà à l’œuvre au sein du Groupe IONIS, comme l’explique Fabrice Bardèche, son vice-président exécutif.
Pourquoi avoir transformé les quatre écoles d’ingénieurs du Groupe en sociétés à mission ?
Auparavant, ces écoles étaient des associations avec le caractère un peu « précaire » de la gouvernance liée à ce statut. Ce n’était pas un modèle facile à manier, en particulier pour les engagements financiers un peu lourds et les investissements. Il nous a donc semblé intéressant de changer cette structure pour un statut plus solide, en dotant la société de chaque école d’ingénieurs d’un conseil de surveillance très largement ouvert. Dans la gouvernance, cela va amener des éclairages à la fois d’industriels, d’universitaires et de chercheurs – de quoi donner une solide direction de réflexion aux engagements des écoles pour le futur. Nous avons également voulu marquer la vocation d’intérêt général de ces établissements par la qualité de sociétés à mission, une notion introduite par la loi PACTE en 2019. Dans celle-ci, il a été prévu que les sociétés qui le souhaitaient pouvaient indiquer leur raison d’être, qui englobe le fondement de leur existence, leur vocation ainsi que leur mission. Ce statut est fait pour montrer, qu’à côté de leurs objectifs, ces sociétés prennent en compte les impacts sociaux, sociétaux et environnementaux de leurs activités. Pour chacun de ces établissements, nous avons ainsi défini des objectifs propres.
Faire que toutes les composantes des écoles soient parties prenantes de ces missions impacte de fait l’impulsion donnée aux étudiants.
Qu’est-ce que cela signifie concrètement ?
Ce n’est pas un engagement qui se limite à sa simple énonciation , ni un effet d’annonce, mais un véritable projet qui s’exécute ! Dans cette notion de société à mission, nous intégrons un certain nombre de dispositifs qui permettent de vérifier que ces objectifs sont bien respectés, en impliquant à la fois les personnels des écoles et des personnalités extérieures associées au projet, de façon à faire vivre la mission à l’intérieur de l’établissement. D’autre part, un organisme externe va contrôler régulièrement les rapports présentés chaque année devant le conseil de surveillance de l’école, pour s’assurer qu’elle se donne bien les moyens de respecter les engagements pris. C’est un dispositif assez complet.
Cette mutation structurelle a-t-elle une incidence sur la pédagogie et les étudiants ?
Une école d’ingénieurs restera toujours une école d’ingénieurs… En revanche, cela va changer l’éclairage de la formation. Ces notions d’impact sur l’environnement et la société, ainsi que les aspects sociaux, sont désormais prises en compte tout au long de la formation. Les professeurs, associés à nos efforts, vont ainsi introduire ces valeurs dans l’ensemble des projets sur lesquels vont travailler les étudiants. Est-ce que la démarche choisie est économe en énergie ? Comment s’assurer qu’on ne crée pas un épuisement supplémentaire des ressources ? Ces notions vont se retrouver tout au long de la pédagogie. Faire que toutes les composantes des écoles soient parties prenantes de ces missions impacte de fait l’impulsion donnée aux étudiants. C’est un engagement collectif qu’on va transfuser à l’ensemble de ceux qui font les écoles et les étudiants, qui seront associés à ces missions.
L’environnement se modifie : les activités économiques, profondément liées à ce qui les entourent, doivent modifier leurs fondamentaux.
Cette évolution est-elle liée à un changement du métier d’ingénieur ?
Elle est avant tout liée à un changement de civilisation. Il y a eu une prise de conscience généralisée du fait que l’environnement était important, ne serait-ce que pour la poursuite d’un développement économique. Si l’on veut ménager nos ressources, il faut atténuer les conséquences néfastes des activités humaines, s’en préoccuper et faire en sorte de transformer le négatif en positif. D’autre part, les sociétés se complexifient, avec un accès à la culture, au savoir et à l’éducation qui s’est beaucoup développé. Il y a aujourd’hui une exigence d’éthique et d’équilibre social qui n’existait pas 50 ans en arrière. L’environnement se modifie : les activités économiques, profondément liées à ce qui les entourent, doivent modifier leurs fondamentaux.
Au fond, cette évolution statutaire n’est que la continuation d’une dynamique déjà à l’œuvre depuis des années au sein des écoles ?
Oui, bien sûr. Le Groupe a grandi, chaque entité également. Nos écoles d’ingénieurs, et d’autres établissements comme l’ISG ou l’ISEG, ont acquis une taille qui leur permet d’avoir une autonomie d’action, d’objectifs et d’identité. C’est ce que nous essayons de développer.
Est-ce que ce nouveau modèle est amené à concerner d’autres écoles du Groupe ?
Nous sommes pionniers sur le sujet en faisant partie des premières écoles d’ingénieurs en France à prendre ce statut de sociétés à mission. Cela illustre notre volonté d’associer l’intérêt général à la démarche de l’école. C’est quelque chose d’important et nous apprendrons certainement beaucoup de cette nouvelle façon de faire. À la lumière des progrès que nous allons pouvoir réaliser avec cette nouvelle organisation, nous déciderons des évolutions des autres écoles dans ce sens, lorsque les conditions seront réunies. Et nous aurons certainement d’autres initiatives dans le même sens.