Dans le cadre de leur dernière année du Bachelor Animation 2D/3D à e-artsup Toulouse, Paul Bauguil, Lorelei Blot, Alexis Combelasse et Amandine Sauvaitre (promo 2021) ont réalisé Hannibal Pepper, un court-métrage d’animation sélectionné lors de la 30e édition du Festival International Séquence Court-Métrage en novembre 2021. En lice pour être projeté dans d’autres festivals, le film s’amuse avec les codes des films d’horreur et de l’animation pour enfants en proposant une sorte de slasher movie potager : une approche étonnante et mâtinée d’humour grinçant. Entretien
Quel est la genèse de votre Hannibal Pepper ?
Paul : Au départ, c’était un travail demandé à toute la classe. Nous avons d’abord dû rechercher un thème et nous sommes finalement tombé sur celui de l’abandon. Nous avons ensuite chacun travaillé sur de petites histoires, des scénarios, pouvant éventuellement donner lieu à un court-métrage.
Amandine : Ce thème de l’abandon était intéressant car pas si souvent traité que cela en animation ! Et nous, nous voulions surtout produire un court-métrage allant jusqu’au bout de cette idée. On ne voulait pas de demi-mesure pour avant tout faire réagir les spectateurs.
Paul : C’est comme cela que la notion d’abandon abordée a dérivé vers l’abandon de soi, le fait de céder à ses désirs les plus profonds, ceux qui sont refoulés et un petit peu tabou. D’où l’idée du cannibalisme.
Quelles ont été vos inspirations ?
Paul : On avait envie de prendre le contre-pied du cinéma d’animation destiné aux enfants et au grand public, comme les belles histoires à la Disney ou Pixar, en le mêlant à d’autres influences, comme Happy Tree Friends ou plus récemment Sausage Party, des œuvres qui, sous un côté cartoon, touchent davantage les adultes avec le registre de la comédie noire. C’est ce qui nous a poussés à passer de personnages humains à des personnages déjà comestibles : les légumes ! Et donc de placer l’histoire dans une sorte de jardin, où tout serait sain, pur et beau, pour ajouter au contraste. On voulait partir d’un postulant mignon et bucolique pour arriver jusqu’à un côté un peu trash, en insufflant à la fois de l’humour et du malaise.
Qui a fait quoi sur le court-métrage ?
Amandine : Chacun a participé aux différentes étapes. Par exemple, pour le storyboard, nous avons tous travaillé une séquence en amont avant de la partager avec le reste de l’équipe pour ajouter de nouvelles idées. Après, nous avions aussi tous un « domaine » particulier sur le projet. Moi, par exemple, j’ai beaucoup participé à l’environnement, l’animation et au sound design.
Lorelei : La réparation des rôles n’a pas été simple car nous n’avions pas forcément les mêmes capacités ni les mêmes compétences. Pour ma part, j’ai dû prendre en charge des aspects très techniques, comme le lightning, le texturing, le rendu, le compositing, ou le rigging, car j’étais plus à l’aise. Je me suis occupée de la direction artistique, avec la création des corps en 2D.
Alexis : Nous avons également tous travaillé sur le scénario, le storyboard et le concept art. Moi, j’étais plus sur le layout, l’étape intervenant entre l’animatique et l’animation 3D menant au film final. J’ai aussi fait un peu de modélisation extérieure pour la végétation et pris en charge l’ambiance sonore.
Paul : Quant à moi, j’ai fait un peu de charadesign avec Lorelei, participé à la modélisation, puis me suis surtout occupé de l’animation et du montage… Le challenge du projet a vraiment été de coordonner nos niveaux disparates en se donnant des coups de mains si besoin. Nous étions tous un peu multitâches sur la production.
Qu’avez-vous ressenti après la sélection et la projection de Hannibal Pepper lors du Festival International Séquence Court Métrage ?
Lorelei : Cela a été un choc émotionnel ! J’ai dû mal à réaliser la présence de notre film dans un festival jusqu’au moment de la projection : c’était un truc de fou ! Je ne pensais même pas que l’on puisse finir notre travail et, quelques mois plus tard, le voir être projeté sur grand écran, devant un public… Cela faisait vraiment chaud au cœur d’autant que cette dernière année du Bachelor a été particulièrement difficile avec la crise sanitaire. Là, nous avons pris beaucoup de plaisir à participer à ce festival. Par contre, si je m’écoutais, je pourrais encore recommencer à travailler sur le film pour corriger ses petits défauts même si le public ne les voit pas ! (rires)
Amandine : Voir l’audience réagir, c’est ce qui m’a le plus marquée même si j’ai encore un peu de mal à réaliser. Lors de la production, on passait surtout notre temps à montrer des bribes du film à notre entourage, pour avoir leurs avis, leurs retours. Mais le fait d’avoir un vrai public qui découvre l’œuvre terminée, ça change tout ! Et forcément, c’est un gros motif de fierté !
Alexis : Comme l’a dit Lorelei, l’année passée n’a pas été facile : la production du film s’est déroulée en pleine période de la Covid-19 et nous avons donc dû travailler principalement à distance pour la quasi intégralité des étapes du film. C’est donc particulièrement gratifiant d’avoir non seulement réussi à le terminer et de pouvoir ensuite le montrer au public. On a su redoubler d’efforts et c’est une joie de pouvoir le diffuser.
Lorelei : Faire un film de cette façon a été particulièrement éprouvant !
Paul : Quand on connaît les conditions de production, on se dit que cette sélection en festival a, en effet, un petit côté irréel ! C’est d’ailleurs marrant de voir que les spectateurs ont un regard totalement différent du nôtre : là où, nous, en tant que créateurs, sommes obnubilés par ce qui pourrait être amélioré, décelant le moindre petit défaut, le public n’a lui pas du tout la même approche. Il se contente d’apprécier !